jeudi 28 août 2008

La Disparition


Voici les premières lignes du roman La Disparition, de l'écrivain français Georges Perec (1936-1982). À la lumière du titre, qu'observe-t-on?

Anton Voyl n'arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. Il poussa un profond soupir, s'assit dans son lit, s'appuyant sur son polochon. Il prit un roman, il l'ouvrit, il lut; mais il n'y saisissait qu'un imbroglio confus, il butait à tout instant sur un mot dont il ignorait la signification.
Il abandonna son roman sur son lit. Il alla à son lavabo; il mouilla un gant qu'il passa sur son front, sur son cou.
Son pouls battait trop fort. Il avait chaud. Il ouvrit son vasistas, scruta la nuit. Il faisait doux. Un bruit indistinct montait du faubourg. Un carillon, plus lourd qu'un glas, plus sourd qu'un tocsin, plus profond qu'un bourdon, non loin, sonna trois coups. Du canal Saint-Martin, un clapotis plaintif signalait un chaland qui passait.
Sur l'abattant du vasistas, un animal au thorax indigo, à l'aiguillon safran, ni un cafard, ni un charançon, mais plutôt un artison, s'avançait, traînant un brin d'alfa. Il s'approcha, voulant l'aplatir d'un coup vif, mais l'animal prit son vol, disparaissant dans la nuit avant qu'il ait pu l'assaillir.

PEREC, Georges, La Disparition, Paris, Éditions Denoël, 1969, 319 p.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Georges Perec est incroyable!
J'étais vraiment étonnée de voir qu'il a réussi à écrire un roman sans utiliser de «e».
J'arrive à peine à écrire une phrase sans «e»...

cath georges gr. 501^ ^ a dit…

Je suis tout à fait d'accord avec Myriame! Déja écrire un livre d'environ 300 pages sans un seul «e» c'est tout un exploit mais d'avoir une symbolique là- dedans en plus! Ça tient du miracle!^^(pour celles qui l'auraient oublié:la symbolique du manque de «e» c'était qu'il avait perdu sa mère et le «e» symbolisait le féminin dans un texte donc plus de mère plus de féminin!)

jade galicia a dit…

Cet écrivain français m'a beaucoup marquée. Ce n'est vraiment pas facile de marquer un roman de 300 pages sans E. C'est dommage que cet homme meurt dans la quarantaine à cause d'un cancer.

P.S Savez-vous que en 1982(lorsqu'il est mort) on a crée une association qui portait son nom?

Anonyme a dit…

je trouve que cet auteur était un peu dérangé. Mais cela a permis d'offrir un enrichissement à la littérature internationale. Faire un livre complet sans e peut paraître étrange à première vue, mais lorsque nous savons se que cela signifie, l'histoire qu'il y a derrière (la perte de sa mère) explique le tout et c'est intéressant.

Anonyme a dit…

J'admire tout simplement cet auteur!

Anonyme a dit…

Sans vouloir etre negative, je trouve que cet auteur avait vraiment enormement de temps a perdre. Par contre, grace a cette oeuvre, il a su se demarquer des autres auteurs. C'est vraiment impressionnant et touchant de savoir que les muses de certains artistes sont leurs propres experiences.

Anonyme a dit…

J'aimerais savoir ou il a eu toute cette patiente pour ecrire un livre sans inclure un seul «e». J'ai essaye d'ecrire une phrase qui faisait du sens et j'ai abandonne...

Anonyme a dit…

Il faut beaucoup d'audace pour passer des nuits à écrire un texte sans «e» !